Le bureau de la bureaucratie par Chawki AMARI

Le premier de tous les ministres, en l'occurrence Abdelmalek Sellal, l'a encore rappelé. Il va combattre la bureaucratie, obstacle au développement et source de corruption. Pourquoi alors, au même moment, le ministère de la Culture sort-il une loi encore plus contraignante pour les éditeurs, parsemée d'obstacles bureaucratiques et de tentations de domination totale sur la filière du livre ? En réalité, malgré les vœux pieux, l'obsession du contrôle est plus forte que la volonté de réduire la bureaucratie asphyxiante qui a poussé la plupart des opérateurs privés à ne monter que des restaurants et des fast-foods.

Ce qui se passe dans le domaine de l'édition ou du cinéma, à travers des décrets tout aussi bureaucratiques, est valable pour les autres domaines. Le ministère de l'Intérieur et sa fumeuse loi sur les associations ou celui de la Communication et la future loi sur l'audiovisuel qui est d'ores et déjà une déception. On le sait, le régime n'a aucune intention de laisser respirer qui que ce soit ou de relâcher cette pression orwellienne sur toute activité privée qu'il ne fait que tolérer.

Qu'est-ce que la bureaucratie, finalement ? C'est l'art de faire perdre du temps aux opérateurs en multipliant les papiers et les autorisations, afin que ceux-ci payent pour aller plus vite ou abandonnent en chemin, ce qui donnera moins de travail à la tutelle. Mais au fond, en y réfléchissant, c'est encore plus complexe pour le cas de l'Algérie. Quand on écoute le Premier ministre dénoncer la bureaucratie pendant que ses ministres en fabriquent, on mesure toute l'importance des conseils de gouvernement réguliers, dont la fonction est de coordonner l'action des ministres. La boucle est bouclée pour M. Sellal, les conseils de gouvernement ne sont justement que des réunions bureaucratiques, ils ne servent à rien. Trop fort. Pour mourir, il va bientôt falloir une autorisation de la daïra.